Les racines historiques du ciment et du béton modernes entre la Suisse et l’Europe = Die historische Wurzeln des modernen Zements und Betons in der Schweiz und in Europe
Après les splendeurs de la construction romaine, les compétences techniques et les connaissances relatives au béton ne se transmettent que localement et en sous-main, jusqu’à ce qu’au cours du XVIIIe siècle, dans plusieurs régions d’Europe, de nombreux chercheurs et constructeurs s’intéressent à l’étude de la chaux, des mortiers et des ciments. Les recherches sur les roches se multiplient afin de découvrir des matières premières facilement disponibles dans la nature pour produire des mortiers qui soient non seulement résistants, durs et compacts, mais aussi capables de durcir sous l’eau. Ces travaux sont stimulés tant par l’étude de l’archéologie et par la découverte de diverses oeuvres d’ingénierie hydraulique réalisées par les Romains, dont la résistance prend des connotations mythiques dans la littérature technique de l’époque, que par un besoin croissant de matériaux utiles à la construction de grandes oeuvres pour le développement du commerce (ports, ponts, canaux navigables et écluses) ou pour la défense militaire. À cette combinaison d’intérêts théoriques et pratiques s’ajoute la passion pour les explorations géographiques et les études naturalistes soutenues par les outils de la chimie moderne qui, depuis le siècle précédent, prend progressivement la place de l’alchimie, à la fois fascinante et insuffisamment vérifiable. Ainsi, des concepts au caractère presque magique, comme celui de phlogistique, sont abandonnés, tandis qu’à la moitié du XVIIIe siècle, le médecin et chimiste écossais Joseph Black découvre le cycle de transformation de la pierre à chaux en chaux, puis à nouveau en pierre à chaux. La découverte de l’origine de la capacité de certaines chaux à durcir dans l’eau, également appelée propriété hydraulique, est due aux recherches de nombreux chimistes et est attribuée, entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, à la présence de minéraux argileux dans certaines pierres calcaires, ouvrant ainsi la voie vers l’invention du ciment moderne, devenu célèbre sous le nom commercial de Portland.