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Abstract

L’EPFL, institution académique d’envergure internationale, s’est engagée à respecter les Accords de Paris en matière de climat, ratifiés par la Suisse le 6 octobre 2017, et se prépare aujourd’hui à employer son savoir- faire et ses compétences pour opérer une baisse drastique de ses émissions de gaz à effets de serre (GES). Les objectifs, fixés par la Confédération Helvétique, sont les suivants: atteindre 50% des émissions de GES de 2006 d’ici à 2030, et la neutralité carbone à l’horizon 2050. Afin de pouvoir respecter ces exigences, il est nécessaire, dans un premier temps, d’évaluer de façon précise l’empreinte environnementale de l’institution. À cet égard, le numérique, pourtant fer de lance de l’innovation à l’EPFL, est très souvent omis des études d’impact environnemental alors même qu’il représente aujourd’hui environ 4% des émissions mondiales de GES, et avoisinera les 8% d’ici à 2025 ( (The Shift Project, 2018) et (Andrae, A., & Edler, T, 2015)). Par ailleurs, le numérique exerce également des tensions considérables sur l’eau douce, l’énergie primaire et les ressources abiotiques (minerais rares). L’épuisement de ces ressources menace directement la viabilité de plusieurs filières, dont la filière informatique. Dans ce rapport, nous proposons donc une évaluation de l’empreinte environnementale globale de l’usage du numérique à l’EPFL par le personnel et les étudiants. Notre analyse ne se limite pas aux émissions de GES, mais considère aussi la tension sur l’eau douce ainsi que l’épuisement énergétique et des ressources abiotiques. Ce document a fait l’objet d’une évaluation par les pairs auprès d’un comité d’experts internationaux. Nous évaluons l’impact carbone brut du numérique à l’EPFL au chiffre conséquent de 7 900 t éq CO2 / an, soit l’équivalent d’environ 3500 vols Paris/New York aller-retour en classe économique, ou de 400 voitures sur la totalité de leur cycle de vie. À titre de comparaison, cela représente 25% des émissions carbones globales1 de l’EPFL en 2017 (32 000 t éq CO2), ainsi que respectivement 103% et 68% des émissions liées à la mobilité pendulaire (7 700 t éq CO2) et aux déplacements professionnels (11 700 t éq CO2) cette même année. De plus, le numérique à l’EPFL consomme annuellement environ 121 000 m3 d’eau douce, 240 300 GJ EP d’énergie primaire et 541 kg éq Sb de ressources abiotiques. La méthode Swiss Ecofactors 2013 publiée par l’OFEV permet de comparer ces différents impacts en les ramenant à des points de charge environnementale (UBP). L’impact cumulatif du numérique à l’EPFL selon ces 4 métriques s’élève alors à 5 061 701 kUBP, la tension sur l’eau représentant 0.9% du total (44 723 kUBP), celle sur les ressources abiotique 11.8% (595 061 kUBP), l’épuisement énergétique 16.1% (817 019 kUBP) et les émissions de GES 71.2% (3 604 898 kUBP). Il apparait de plus que 40 à 50% de l’impact environnemental de l’EPFL est dû au matériel électronique grand public (ordinateurs, laptops, portables, tablettes, etc). Il est aussi estimé que plus de la moitié de l’impact des appareils électroniques est à imputer à leur production. Notre institution souffre, à ce propos, d’un problème de suréquipement. D’après l’inventaire EPFL, un membre du personnel moyen à l’EPFL est ainsi équipé par l’école de 3.3 ordinateurs (fixes et portables confondus). La perte financière due à ce suréquipement s’élève selon nos estimations à près de 7.4 millions de francs suisses par an. Celle due à la surconsommation électrique, à 1 million de francs annuels supplémentaires. En limitant le renouvellement du matériel électronique, en faisant chuter le taux d’équipement à une valeur plus raisonnable et en favorisant son recyclage, l’EPFL pourrait donc réduire de manière significative son empreinte environnementale numérique et se doter de moyens conséquents pour assurer la transition vers un modèle de numérique durable. Pour ce faire, nous recommandons la création d’un service de gestion centralisée. Enfin, sur la base des données disponibles, nous avons grossièrement estimé que l’empreinte du numérique à l’EPFL devrait être réduite de près de 18% par an jusqu’en 2030 afin de respecter les obligations fédérales. Même si ce chiffre pourrait être raffiné par une étude plus approfondie, cet objectif semble si ambitieux qu’il sera probablement obligatoire de compenser l’impact excédentaire du numérique par des baisses supplémentaires dans d’autres domaines. L’intégration du numérique au bilan environnemental annuel de l’EPFL nous semble dès lors indispensable.

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