Abstract

En juin 2016, les citoyens suisses rejetaient une initiative populaire visant à l’instauration d’un revenu de base inconditionnel. Le résultat négatif très net – plus de 76% – reflète mal la réalité d’une campagne dont une des particularités a été d’être d’une longueur exceptionnelle et d’une intensité rare dans un pays pourtant habitué à la pratique des votations et aux débats sur des sujets extrêmement variés. La nouveauté de la proposition – introduire dans la Constitution l’obligation pour l’État de verser une rente permettant une « vie digne » à tous les habitants – a directement engendré un débat se cristallisant autour d’enjeux rarement soumis à un véritable débat national. Ces enjeux ont touché aussi bien à la valeur de l’effort et du travail, à l’accélération des rythmes de vie et à la perte de sens, à la justice sociale ou au statut de l’État providence. Parmi les différents éléments cités dans l’argumentaire général en faveur ou contre l’instauration d’un revenu de base inconditionnel figuraient certains éléments ayant trait à des thématiques de mobilité et de rythmes de vie. Ceux-ci sont particulièrement intéressants, parce qu’ils dessinent en creux des possibles d’une mobilité du futur et que ceux-ci font rarement l’objet d’un débat public. Le débat suisse autour du revenu inconditionnel a d’ailleurs eu ceci de particulier qu’il n’a porté presque que sur le principe du mécanisme de revenu inconditionnel, sans que les conditions réelles de sa mise en œuvre ne soient abordées. Il n’y a pas eu par exemple de chiffrage de la mesure par le comité d’initiative. Étudier les argumentaires déployés dans le cadre du débat suisse est donc éclairant quant à l’impact de cette mesure sur les pratiques des mobilités et sur la décélération des rythmes de vie. Pour être complète, cette analyse du débat doit englober les positionnements des corps constitués – partis politiques, syndicats, collectivités publiques – mais aussi ceux des citoyens eux-mêmes, du tissu associatif actif en matière de mobilité, de rythme de vie voire de croissance et de décroissance. Cette analyse peut s’appuyer sur les prises de position émises via différents canaux : articles de presse, lettres de lecteurs, émissions radio et télévisées, prises de position écrites, blogs et réseaux sociaux notamment. Le présent rapport de recherche décortique le débat suisse autour de l’instauration d’un revenu de base inconditionnel en explorant les différents lieux de débat dans les langues française, allemande et italienne, pour couvrir la pluralité des arguments – et des contre-arguments – touchant à la mobilité et aux rythmes de vies. Il vise de plus à identifier les acteurs de ce débat et à les repositionner dans un champ d’expression politique propre à la Suisse. Il cherche ainsi à reconstruire les arguments s’étant cristallisés autour des mobilités – saisonnières, touristiques, résidentielles, pendulaires – des rythmes de vie et leurs argumentaires.

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