Résumé

Durant les dernières décennies, la croissance démographique a entraîné une large intensification de l’urbanisation et une évolution des pratiques agricoles, souvent au détriment des zones (semi-) naturelles. Cette modification des paysages a un effet néfaste sur la biodiversité, en provoquant la disparition de nombreux habitats, une fragmentation importante du paysage et une diminution des flux de gènes, rendant les populations concernées moins viables. Dans ce contexte, ce projet avait pour but d’étudier l’impact du processus d’urbanisation sur la connectivité fonctionnelle et la diversité génétique dans deux grandes agglomérations en Suisse et en France. La première partie était centrée sur la région du Grand Genève et avait pour but de réaliser un bilan de l’état actuel de la connectivité entre les espaces verts, notamment pour la plante Plantago major (Grand plantain) et le papillon Pieris rapae (Piéride de la rave), espèces fréquentes en milieu urbain et choisies comme modèles biologiques pour cette étude. Le but était également de mesurer l’impact de projets d’aménagement prévus dans le Grand Genève à l’horizon 2030 (constructions et projets routiers) sur la connectivité fonctionnelle. Les analyses réalisées ont été basées sur l’utilisation de données de couverture du sol permettant de créer des cartes de résistance et de calculer des chemins à moindre coût modélisant le déplacement des individus en fonction des caractéristiques du paysage. Des graphes paysagers, présentant les liens entre les aires d’habitat ont également été créés et ont permis de mettre en évidence des régions avec une connectivité réduite et des espaces verts potentiellement isolés. Des barrières potentielles pour la dispersion des espèces étudiées ont ainsi pu être observées, constituées notamment par les immeubles, les routes, mais également par les grandes surfaces de forêts, cultures et vignobles. De plus, cette étude a montré que la connectivité entre les petits espaces verts des centres urbains et les espaces périphériques de plus grande taille est fragile et instable. Il est donc important de préserver ou restaurer des corridors favorables pour la dispersion des espèces, permettant de maintenir ou améliorer la connectivité entre les espaces verts. Finalement, les résultats ont montré que les projets de construction et les projets routiers étudiés avaient pour conséquence une dégradation ou une fragmentation supplémentaire des habitats (semi-) naturels et provoquaient une diminution partielle de la connectivité fonctionnelle pour les espèces étudiées. La deuxième partie de ce projet avait pour but d’analyser l’impact de l’urbanisation sur l’évolution spatio-temporelle de la diversité génétique pour P. rapae dans la région de Marseille. Quatre transects allant de la périphérie vers le centre de Marseille ont été définis et ont permis de délimiter différentes zones possédant des densités d’urbanisation différentes. Des simulations de l’évolution des populations et des génotypes au cours du temps ont été réalisées sur la base de paramètres liés au déplacements, à la reproduction, aux mutations et à la mortalité des espèces étudiées. La diversité génétique a ensuite été calculée le long des transects et a permis la comparaison entre des zones de densités urbaines différentes. Deux scénarios on été considérés pour cette étude : 1) Les individus de P. rapae étaient répartis de façon homogène sur le territoire au début des simulations ; 2) Aucun individu n’était présent dans les habitats des centres urbains, afin de simuler une migration des individus vers le centre ville en provenance de la périphérie. Pour les deux scénarios, les résultats ont mis en évidence une diminution de la diversité génétique dans les zones possédant une forte densité d’urbanisation, mais la différence était plus marquée avec le deuxième scénario (migration des individus). Des simulations ont également été réalisées pour des espèces de papillon avec une capacité de dispersion plus faible, puis en prenant en compte l’effet d’une intensification future de l’urbanisation. Dans les deux cas, les simulations ont montré une réduction du nombre d’individus de P. rapae et une diminution de la diversité génétique dans les zones possédant des densités d’urbanisation moyennes ou fortes. Afin d’assurer le maintien de populations génétiquement stables et diversifiées, il est donc important de veiller à maintenir ou améliorer la connectivité du paysage, notamment entre les espaces verts situés dans les centres urbains denses et ceux de la périphérie. Ces considérations devraient être prises en compte lors de la planification de chaque projet d’aménagement afin d’assurer un processus d’urbanisation durable.

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