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Abstract

Classiquement, la question de l’habiter est celle de la façon dont les individus sont dans l’espace. Heidegger formulait cela de la manière suivante : habiter comme « manière dont les mortels sont sur la Terre ». Cette tradition qui informe fondamentalement la science géographique peut être retracée jusque chez Platon dont le Timaios travaille, entre autres, la nécessaire localisation dans l’espace des êtres humains et des choses. Je souhaiterais proposer un déplacement de la problématique, avec pour ambition une nouvelle théorie de l’habiter, fondée sur le problème de la pratique : « faire avec l’espace » au lieu d’être dans l’espace » constitue cette perspective. Cette perspective a été ouverte par les contributions de Werlen (1995 ; 1997) et de Lussault (1996) où la question de la pratique est centrale. On y trouve également l’indication selon laquelle « espace » peut être conceptualisé différemment : non pas comme étendue, conteneur ou surface terrestre, mais comme une condition et ressource de l’action. La question se pose maintenant comment formuler une théorie relativement cohérente de l’habiter qui soit adéquate par rapport aux champ phénoménal, réputé comme étant difficile, plein de contradictions, et confus. Les individus sont-ils ancrés localement ou « footloose » ? Est-ce que mondialisation signifie homogénéisation ou différenciation ? Est-il encore possible de distinguer les pratiques touristiques d’autres pratiques de recréation ? La communication à distance rend-elle obsolète le face-à-face ? Est-ce que patrimonialisation signifie ouverture ou fermeture des lieux ? Comment distinguer différentes qualités d’espace urbain sans retomber dans les typologies classiques qui n’ont plus de sens ? On peut commencer par travailler ces questions à l’aide d’une approche appréhendant le régime d’habiter, les styles d’habiter et les pratiques d’espace. L’hypothèse de l’individu géographiquement pluriel et de la différenciation accrue de l’habiter informe cette approche. Au centre se trouve l’idée que la mobilité géographique des individus, entre autres, rend moins opératoire le modèle « Heidegger-Moles » du rapport à l’espace. Si nous n’appréhendons pas l’habitant comme étant fondamentalement temporaire et mobile, nous passons à côté des caractéristiques essentielles de l’habiter contemporain. Dans un premier temps, je tenterai de montrer comment on peut opérer ce changement théorique de l’être dans l’espace vers le faire avec l’espace. Dans un second temps, je tenterai de mettre en œuvre cette perspective de la pratique d’espace en montrant différentes manières dont les individus incorporent l’espace dans leurs pratiques

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