Le temps de déplacement : perdu, utile ou de qualité ?
Au cours des deux dernières décennies, plusieurs recherches ont mis en évidence l'importance des expériences vécues du temps de déplacement. Avant cela, ce temps du quotidien a longtemps été jugé comme principalement improductif, notamment par les économistes, qui suggèrent encore que les individus sont des agents rationnels et qu'ils chercheraient à le minimiser [1]. À ce jour, les controverses sur le temps de déplacement opposent une partie des décideurs de la mobilité, qui le considèrent essentiellement comme improductif, aux usagers de la mobilité, qui peuvent le considérer comme un temps social, productif ou de détente, en fonction de leurs aspirations et du confort qu'ils perçoivent [2]. En outre, les rythmes individuels de mobilité peuvent entrer en conflit avec les rythmes sociaux, qui peuvent contraindre les individus en raison de l'efficacité plus élevée de l'offre de transport à certains moments de la journée [3]. Pour surmonter l'accélération des rythmes de vie, pouvant entraîner stress et sentiment de pénurie temporelle, Rosa propose le concept de « résonance ». Selon l'auteur, être en résonance avec le monde permet aux individus d'être transformés par celui-ci, plutôt que d'avoir une relation instrumentale avec ce dernier. Cette recherche vise à analyser ces deux controverses relatives au temps de déplacement entre les décideurs et les usagers de la mobilité. Un premier résultat est l'élaboration d'un modèle conceptuel qui vise à améliorer la compréhension de ces positions divergentes et de proposer un potentiel consensus, enrichi par ces deux points de vue. À partir de ce modèle conceptuel, une méthode mixte a été adoptée pour analyser ces controverses. D’abord, une analyse textométrique [4] a été appliquée à un corpus de 21 plans de déplacements urbains (PDU) pour identifier les termes les plus fréquemment utilisés entre le temps chronométré et le temps vécu sur la période 2000-2020. Ensuite, des entretiens semi-directifs ont été réalisés avec des acteurs opérationnels des sept métropoles étudiées qui sont chargés de réaliser ces PDU afin d’approfondir les résultats de l’approche quantitative. Les résultats de ces deux analyses révèlent que ces PDU accordent une attention limitée à la possibilité de vivre des temps de déplacement de qualité, allant au-delà de l’optimisation leurs durées. Et si les entretiens ont révélé que les auteurs des PDU ont conscience de cette possibilité, le format de ces documents ne permet pas toujours de fixer des objectifs clairs sur ce sujet.
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